Pénurie de main d’oeuvre – Qui est le dindon de la farce ?
Selon les plus récentes études sur les besoins en main d’œuvre dans le secteur de la construction de la Commission de la Construction du Québec, nous aurions besoin de plus de 17 000 ouvriers et ouvrières pour combler ce que nous pourrions appeler l’écart entre les besoins en main d’œuvre et la main d’œuvre disponible.
Or, la semaine passée, de nouveaux diplômés par les AEP dénonçaient une ouverture du bassin de main d’œuvre dans leur région, sans qu’eux-mêmes n’aient été appelés, après avoir cogné à la porte de plus de 50 compagnies.
Nous réitérons notre appui à la position de notre association représentative, la FTQ-Construction, rappelons que nous privilégions la formation professionnelle plutôt que l’entrée dans l’industrie par ouverture de bassins de main d’œuvre.
Maintenant que cela est dit, profitons de l’occasion pour rappeler quelques statistiques éloquentes.
Lors de quel siècle parlerons-nous de rétention de la main d’œuvre dans la construction ?
Si nous agréons que nous avons certainement des enjeux en matière de main d’oeuvre, nous devons avoir la lucidité de mettre la CCQ au courant de ses propres statistiques. en 2022-2023, nous avons perdu 28 876 ouvriers et ouvrières (actifs devenus inactifs), pendant que 25 581 devenaient actifs. Imaginez les immenses difficultés à gérer le volume d’entrées et de sorties.
La moyenne des 10 dernières années maintenant : 24 425 entrées par année. Aucune structure ou industrie n’a la capacité de gérer cette rotation gigantesque de main d’oeuvre. C’est pour cela que nous devons être pragmatiques.
Nous posons quatre questions, qui ne visent pas à augmenter le volume d’entrées et de sorties de l’industrie, mais plutôt de la civiliser et de faciliter la tâche de tout le monde, même celle des employeurs.
- Comment l’apparition d’une certaine forme de sécurité d’emploi dans l’industrie pourrait régulariser la situation et mettre fin à ce régime de discrimination qui rend tous les ouvriers temporaires ?
- S’assurer que les principes de base en relation de travail soient appliqués plus sévèrement améliorerait-il la rétention de la main d’oeuvre ?
- Réviser en profondeur le régime de SST pour mettre fin au bilan atroce de l’industrie en matière de SST, autant en matière d’accidents de travail que de maladies professionnelles, depuis 1891 (oui, nous avons les chiffres) n’aiderait-il pas à conserver notre main d’oeuvre ?
- Investir massivement dans nos ouvriers et ouvrières, en commençant par une formation préalable à l’entrée dans l’industrie, n’aiderait-il pas à limiter l’hémorrhagie annuelle ?
Quelques données sur l’investissement
En parlant d’investissement : le Québec est le cancre des cancre dans l’investissement privé par emploi. Cliquez sur l’image pour voir l’article de La Presse.
Un bilan désastreux en placement de la main d’oeuvre.
Et finalement, la Commission qui se targue de travailler fort sur la maillage entre les entreprises et les ouvriers et ouvrières : nous prendre pour des valises. Dans son rapport de 2022, La CCQ a placé 2% des travailleurs.
En effet, en revoyant le règlement sur le placement dans l’industrie et en bloquant les efforts syndicaux pour faire travailler les ouvriers sur les chantiers, ils ont rendu les ouvriers responsables de se trouver un emploi.
Des conclusions chiffrées qui ne redorent pas le blason de la Commission.
Si nous observons adéquatement les informations disponibles, nous pouvons tirer deux conclusions :
- La CCQ est complèment déconnectée des éléments qui contribuent à la rétention de la main d’oeuvre dans le secteur, a contrario travaille dans l’intérêt des employeurs qui préfèrent une main d’oeuvre jetable et docile, comme démontrent les statistiques étudiées.
- La CCQ est absolument inapte à l’accompagnement des travailleurs vers l’emploi, preuves à l’appui, depuis la fin du placement syndical, qui avait au moins le mérite de faire travailler les ouvriers et de les accompagner vers les employeurs.
Marc-André Blanchette, Responsable des communications
Association des Manoeuvres Inter-Provinciaux