RÉPLIQUE : ALERTE À UNE EXPLOSION DES COÛTS DE CONSTRUCTION (MARIO DUMONT)
Nous avons le devoir de rectifier les faits. M. Dumont, puisque ce que vous dites dans cet article est faux et témoigne de votre appétit à protéger les petits patrons qui ont à l’époque bien garni les caisses électorales de l’ADQ, un parti pro-patronal, grand-père de l’actuelle CAQ.
Nous notons au passage que les consommateurs de Québécor vous paient bien grassement pour que vous frappiez sur la tête des ouvriers et ouvrières de la construction, qui font d’ailleurs probablement partie de votre lectorat. Avez-vous la propension de faire le même procès de votre ami Eric Caire, qui vient de démissionner dans la foulée du scandale de SAAQ-Clic, avec des dépassements de coûts de 500 millions, qu’on continue d’ailleurs de compter ?
Si c’est si dispendieux pour les contribuables, dont des membres de notre syndicat font partie également, séparez-vous de votre pension à vie de député, ce sera déjà cela de fait. Combien avez vous gagné l’an passé sur le dos des consommateurs et clients de Québécor ? De combien a été votre augmentation l’an passé ? Avez-vous déjà mis les pieds sur un chantier pour y travailler ?
Toutes des questions auxquelles nous avons au moins une idée de la réponse.
Selon le Construction Labor Market Analyzer, le coût de la main d’œuvre représente seulement entre 20 et 40% des dépenses d’une entreprise de construction. Vous voulez contrôler les coûts ? Regardez les autres postes de dépenses, les ouvriers ne doivent pas être les seuls a en faire les frais.
Notre industrie a la responsabilité de garder notre main d’œuvre et d’éviter son exode dans les autres provinces canadiennes, et une des meilleures manières, surtout dans le contexte où la pénurie de main d’œuvre frappe fort, de tenter de la maintenir en place avec des salaires attrayants. N’oublions pas que la moyenne d’heures travaillées au cours de l’année 2024, était de 1005 heures par année par travailleur.
Après la dernière convention, nous accusions un retard, pour seulement préserver le pouvoir d’achat des ouvriers, de 9,1%. Donc 9,1% juste pour suivre l’inflation.
Depuis quand la hausse des prix en immobilier est en relation avec les salaires ? Est-ce que l’augmentation de 50%-60% des prix des propriétés est justifiable par une augmentation annuelle des travailleurs et travailleuses de la construction entre 2021 et 2024 de 2,05% par année ? Où est l’argent des ouvriers et ouvrières si tel est le cas, où est notre 50% d’augmentation ?
La productivité a augmenté significativement lors des dernières années, grâce à la compétence et à la débrouillardise de nos ouvriers et ouvrières, mais ils n’ont jamais vu la couleur de cet argent. Pourquoi nous devrions nous contenter de nous appauvrir ? D’ailleurs, on ne vous voit pas dénoncer la hausse de salaire de 30% des députés, c’est tout de même bizarre. Un chum s’tun chum, comme dirait l’autre.
Le cas du résidentiel dans les années 90, un exemple qui parle sur l’invalidité de vos propos.
Lors du désassujettissement du secteur résidentiel dans les années 90, le secteur a été désyndiqué et les salaires ont fondu de 40%. Les travailleurs n’avaient plus d’assurance ou de fonds de pension. Quel effet sur le prix des propriétés ?
Les prix ont monté autant que lorsque le secteur était syndiqué et que les travailleurs avaient des conditions dignes.
Ce ne sont pas les coûts de main d’œuvre qui font augmenter le prix des loyers, c’est la soif de profit des propriétaires et des entrepreneurs. Ajoutons que l’explosion des prix des loyers était commencée bien avant les négociations actuelles, ce qui prouve que votre argumentaire fallacieux ne tient pas la route.
Vous parlez d’investissement dans votre article. Parlons-en. Les entreprises en construction vivent au crochet de l’État depuis très longtemps, et les contribuables les subventionnent de manière ridicule.
Les entreprises, à leur tour, se tournent et engrangent des profits comme jamais, sans investir dans la main d’œuvre ou dans l’équipement dans l’immense majorité des cas, en utilisant, pour la plupart l’évitement fiscal ou même l’évasion fiscale.
Vous mêlez énormément de choses, et vous parlez dans votre article du prix à payer. Ne mêlez pas, de grâce, l’explosion des coûts des contrats publics à nos ouvriers et ouvrières. Combien de vos amis des chambres de commerce, qui ont contribué à la caisse électorale à l’époque de l’ADQ, ont travaillé activement à faire exploser les coûts de construction au Québec à travers des pots-de-vin et de la corruption ?
Soyons sérieux, toutes les entreprises travaillent pour faire du profit, alors pourquoi ne pas graisser des Monsieur 3% un peu partout à travers la province ? Dites-nous, quelle part de la corruption revient dans les poches des travailleurs et travailleuses syndiqués de la construction ? Combien coûte l’évasion fiscale des entreprises que vous défendez à chaque présence au micro ?
Vous parlez dans votre texte du prix à payer pour les contribuables. Nous allons vous parler d’un autre prix à payer. Des engelures, des coups de chaleur, des douleurs chroniques au dos, aux tunnels carpiens, vestiges du travail sur les chantiers.
Les études sur la pénibilité du travail en France parlent d’ouvriers qui vivent six ans de moins que les cadres, si on parle du prix à payer. Avoir mal partout, et souffrir chroniquement à la retraite, c’est le poids de notre industrie sur le dos des travailleurs et travailleuses. De grâce, quand vous ne savez pas de quoi vous parlez, gardez le silence.
Si vous acceptez, nous vous invitons à passer une journée à casser du béton avec nos membres, nous nous engageons à assurer votre sécurité. Vous verrez à quel point notre 8%, 5%, 5%, 4%, c’est de la petite monnaie pour se faire mourir à petit feu comme nous le faisons.
Enfin, la construction représente 30% des décès au travail pour un peu plus de 5% de la main d’œuvre. Le prix à payer, nous sommes encore beaucoup trop nombreux à le payer. Aurez-vous le courage de dire que nous sommes chanceux, ou privilégiés après votre quart de travail ?
Encore la semaine passée, un ouvrier a payé le prix ultime de notre industrie. On offre nos sympathies à sa famille, à ses collègues et à ses amis. Et c’est comme cela à chaque semaine. Des familles déchirées, des enfants sans parent, etc. Alors ne venez pas nous parler du prix à payer, ou encore du fait que nous serions chanceux et gâtés. Un minimum de respect M. Dumont.
Pour lire l’article auquel nous répliquons, voici le lien :
https://www.journaldemontreal.com/2025/04/05/alerte-a-une-explosion-des-couts-de-construction
Marc-André Blanchette,
Responsable des communications, AMI-FTQ-Construction